A Bucarest, le grand ensemble est la ville
Il porte en lui un héritage difficile et lourd, celui de l’ère Ceausescu, dont on imagine peu l’échelle et l’ampleur. La France et ses voisins qui s’étaient émus à l’époque des destructions massives du centre historique à coups de pelleteuses, pourraient tout autant s’émouvoir aujourd’hui de l’état de ces quartiers, accueillant 80% de la population Bucarestoise, où le cœur du promeneur novice balance entre un sentiment de désolation architecturale et l’expression d’une richesse sociale, d’une vie, d’une effervescence malgré certaines difficultés évidentes. Preuve que l’un ne semble guère empêcher l’autre, même s’il n’y contribue pas vraiment. Comme si le rythme et les traditions de la vie rurale avaient survécu à ces titans de béton usés, fatigués, eux aussi témoins et victimes de la difficile transition vécue depuis la révolution, dont les changements du moins ceux espérés et imaginés un soir de décembre 89 tardent à venir. Car changement il y a, les publicités pour les derniers produits de luxe, où les casinos sont légion et s’affichent sur les façades défraichies permettant ainsi aux habitants d’arrondir les fins de mois, en contrepartie d’une pénombre permanente. Changement il y a encore, quand les cheminées industrielles étaient synonymes d’une économie en marche et de travail pour tous, alors qu’aujourd’hui elles s’essoufflent lentement, mais surement. L’humeur oscille entre résignation des vieilles générations, espoirs des plus jeunes et un désengagement chronique des pouvoirs publics, que faire ? Attendre des jours meilleurs, peut-être, mais l’espoir semble avoir quitté les lieux, l’habitude et la lassitude l’ont remplacé. Il ne reste plus qu’à cultiver son propre jardin.
(Certaines photos sont Lauréates du photoreporter étudiant de Paris Match 2010 et de Matières de nos villes par Sciences Po Paris)
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PANORAMAS